que lis-tu me lis-tu où es-tu
que fais-tu soir venu
lorsque mouvement tu
— dévêtue de ta parure — dors
entre nous si ténu tout s’est tu
dois-je rester partir des closeries
de fleurs où s’endorment par terre les poésies
hors nous l’ordre des choses se renverse
et nous nous redressons telles des tiges
sous l’averse des jardins stylisés et rompus
rare est la bête en moi pourtant elle sait gémir
comme une enfant au genou écorchés et à l’âme
soucieuse de toute tristesse je me pardonne
de ne suivre des chemins d’appartenance aigus
avenue où je lis que lis-tu des journaux
érudits mais la bête en elle me compose
des morphologies de mots si morts
si repérables que jour elle ne leur donne; chante
sa chair dans la voix désappartenue du poème
chaque jour je m’y tue te tais-tu
de savoir l’enflement du pathos
et pourtant je la fuis chaque fois la bête,
et P’athos, tout autre mousquetaire
à l’épée d’encre acérée, autre mont saint en feu;
je la fuis dans l’amour dans l’esprit dans le nu
je déconsiste résiste me suis-tu toutefois
je suis tu tu n’es rien qu’un tissu de pures
vérités qui de peurs me détruisent
certains soirs elles ont tout fracassé
et je mange les restes pour donner
droit de vie à la plainte à ma guise
indicible et prostrée je me tais
dans un sévère tu je me lave visage
dont j’assemble poussières & clarté
le fracas de la face peut taire l’éprise
de profils bas la fleur a son parterre; enfin
ce n’est qu’une extériorité si peu prioritaire
qui coule à flot dans l’air labyrinthique
des jardins stylisés de nos ères infécondes;
il pleut mais dedans le nordique est bien clair
il écrit seule vers son étoile qui scintille dans son mouvement tu
tout souffle suspendu pendant que lis-tu
dans mes paumes où les mots recueillis ont vécu
alors le temps est si peu prioritaire
que tu ne lises rien que tu dormes et me tues.
Martine Cros, le 22 mars 2017, Désappartenue
& détail d’étude Feuilles de sein